La Cour suprême américaine valide l'interdiction aux mineurs des traitements de transition

Ce mercredi, la Cour suprême à majorité conservatrice a permis à l'Etat du Tennessee d'interdire aux mineurs transgenres l'accès aux traitements de transition, sujet de profonde crispation dans la société américaine. Sur 1,6 million de personnes se définissant comme transgenres aux Etats-Unis, plus de 300.000 sont âgées de 13 à 17 ans.
La Cour suprême à majorité conservatrice a permis mercredi à l'Etat du Tennessee d'interdire aux mineurs transgenres l'accès aux traitements de transition, sujet de profonde crispation dans la société américaine. Cette décision est potentiellement lourde de conséquences, la moitié des Etats américains ayant prohibé les traitements pour les mineurs qui ne se reconnaissent pas dans leur genre de naissance.
Sur 1,6 million de personnes se définissant comme transgenres aux Etats-Unis, plus de 300.000 sont âgées de 13 à 17 ans, dont plus du tiers vivent dans un de ces Etats, selon une étude du Williams Institute, groupe de réflexion de l'université UCLA. Par six voix contre trois, les juges conservateurs contre les progressistes, la Cour suprême proclame que la loi adoptée en 2023 par le Tennessee (sud), interdisant aux mineurs transgenres l'accès aux bloqueurs de puberté et aux traitements hormonaux de transition, ne présente pas de caractère discriminatoire.
Des mineurs et leur famille, une gynécologue de Memphis ainsi que l'administration démocrate précédente de Joe Biden affirmaient que cette loi violait le 14e amendement de la Constitution sur "l'égale protection" des citoyens puisqu'elle prive les personnes transgenres d'accès à des traitements autorisés à d'autres pour raisons médicales.
Mais la Cour, dans une décision rédigée par son président John Roberts, leur donne tort et s'en remet à la volonté "du peuple, de ses représentants élus et au processus démocratique", considérant qu'il ne lui appartient pas de se prononcer sur "la sagesse, l'équité ou la logique" de la loi. "Ce dossier porte le poids de vifs débats scientifiques et de politique publique quant à la sûreté, l'efficacité et l'adéquation des traitements médicaux dans un domaine en pleine évolution", souligne aussi la majorité.
"Caprices politiques"
A contrario, la juge Sonia Sotomayor, dans un avis écrit de désaccord auquel s'associent les deux autres progressistes, reproche à la décision de "tordre la logique et la jurisprudence" pour conclure que la loi du Tennessee n'est pas discriminatoire alors qu'elle "catégorise expressément sur la base du sexe et du statut transgenre".
"La Cour abandonne ainsi les enfants transgenres et leurs familles à des caprices politiques", déplore-t-elle. "Cet arrêt est une perte terrible pour les personnes transgenres, nos familles et quiconque se soucie de la Constitution", a réagi dans un communiqué Chase Strangio, de l'influente organisation de défense des droits civiques ACLU, qui représentait les plaignants lors des débats en décembre.
Premier avocat ouvertement transgenre à plaider devant la Cour suprême, Chase Strangio, et qui a confié avoir lui-même bénéficié de ces traitements de transition, avait reproché à la loi de les interdire totalement aux mineurs sans prendre en considération leurs avantages, tels que la réduction significative des cas de dépression et de pensées suicidaires.
La Cour suprême "démolit une fois de plus les droits des Américains à décider pour leur propre corps", s'est indignée dans un communiqué Nancy Northup, la présidente du Center for Reproductive Rights (Centre pour les droits reproductifs), rappelant sa décision historique de juin 2022 annulant la garantie fédérale du droit à l'avortement.
"Bon sens"
La très conservatrice Alliance Defending Freedom (ADF) se félicite en revanche d'une décision qui "contribuera à protéger les 26 autres lois similaires adoptées par des Etats et à ramener le bon sens dans le système médical américain". Cette loi vise à protéger les mineurs d'interventions médicales "risquées et susceptibles d'avoir des conséquences souvent irréversibles", avait plaidé en décembre le représentant du Tennessee.
Depuis son retour à la Maison Blanche en janvier, Donald Trump est revenu sur une série d'acquis obtenus par les personnes transgenres, un de ses chevaux de bataille contre le "wokisme", la bien-pensance dont il taxe le camp démocrate.
Le président républicain a signé un décret mettant fin aux aides publiques pour les traitements de transition des mineurs, chimiques comme chirurgicaux, promettant de s'y opposer par tous les moyens légaux. "A travers le pays, les professionnels de santé mutilent et stérilisent un nombre grandissant d'enfants influençables", selon le texte du décret.